Cerny-en-Laonnois : la Chapelle-Mémorial et les cimetières français et allemand
Au centre du Chemin des Dames, le village reconstruit de Cerny-en-Laonnois est un pôle mémoriel de premier plan : au cimetière français répond un immense cimetière allemand, deux ossuaires ainsi qu’une chapelle-mémorial et un monument britannique. C’est ici que les autorités militaires et politiques se rendront le plus souvent en visite au Chemin des Dames après la guerre. Site totalement reconstruit, il apparaît modeste au regard des nombreux événements qui en firent l’un des points les plus disputés de la Grande Guerre de 1914 à 1918. La chapelle-mémorial érigée en 1951 et dédiée à la réconciliation, fait partie d’un ensemble qui compte depuis 1960 une lanterne des morts, devant servir à éclairer d’une lumière bleue le «champ des morts».
Le cimetière français de Cerny-en-Laonnois se trouve le long du Chemin des Dames, face à la chapelle-mémorial. Dans cette nécropole nationale, qui reçut en 1919 et 1925 les corps des combattants des plateaux de Vauclerc, Vendresse, Troyon, Beaulne et Braye-en-Laonnois, 5150 combattants français reposent sous des carrés fleuris, dont 2386 dans un ossuaire. Le cimetière compte de nombreuses tombes de tirailleurs africains et malgaches tombés lors de l’offensive Nivelle, ainsi que celles de 54 soldats russes prisonniers. Le cimetière allemand de Cerny-en-Laonnois est légèrement en retrait derrière le cimetière français. Il est édifié à partir de 1919 en application de l’article 225 du traité de Versailles, par regroupement de cimetières et de tombes individuelles isolées. Il comptait dans un premier temps 5125 tombes, avant d’être agrandi dans les années 1924-25. Aujourd’hui ce cimetière compte 7526 morts, dont près de 4000 en ossuaire. Il est rénové en 1972 (installation de croix en pierre).
La Chapelle-Mémorial du Chemin des Dames et la lanterne au mort sont situées sur une petite esplanade, la chapelle de plan allongé est un édifice moderne en pierre de taille. Le mur de façade est ajouré de trois arcades cintrées formant péristyle. Enserré entre deux murs pignons débordants, le toit à longs pans, coiffé d'un petit clocher, est couvert en tuiles. La nef est percée de trois baies cintrées pourvues de verres cathédrales losangés jaunes, verts et violets. La pierre de taille laissée à nu constitue le matériau privilégié de l'intérieur de l'édifice. L'arc triomphal en tiers point ouvre sur le chœur à cinq pans. Le plafond trapézoïdal est constitué de lattis de bois enduit de plâtre. Plusieurs plaques commémoratives sont apposées sur les parois intérieures de la chapelle. La lanterne des morts est matérialisée par un mât en ciment brut, couronné de trois tubes lumineux qui éclairent le Chemin des Dames. Elle fait partie du projet original de création d’une chaîne de lumière éclairant la ligne de front de la mer du Nord au territoire de Belfort. Elle répond à la tour Lanterne de Notre-Dame de Lorette et à celle de l’ossuaire de Douaumont. Le projet, initié après la Grande Guerre, ne fut construit qu’après la seconde Guerre Mondiale. Au pied de la lanterne des morts, une stèle est élevée en honneur de la 38e division d'infanterie.
Histoire du site
A partir de septembre 1914, Cerny est très proche de la ligne de front, il reste du côté allemand jusque mai 1917 où il se retrouve au cœur des combats pour la reprise du Chemin des Dames. Entièrement détruit, il fut alors déplacé à un kilomètre au sud-ouest par décision préfectorale établie selon le projet d'aménagement émis le 8 juillet 1924. La commune fut reconstruite de manière plus modeste, l´ensemble des habitants n'étant pas revenu au village. En 1920, Cerny-en-Laonnois était adopté par le Puy-de-Dôme dans le cadre de l'adoption des communes dévastées par les régions non sinistrées.
Histoire de la chapelle-mémorial du Chemin des Dames
La volonté d´ériger une lanterne des morts sur le Chemin des Dames semble avoir été émise par Blondel, architecte à Bourg-et-Comin, en 1933. Mais ce n’est qu’en 1949, au moment où fut créé le comité du mémorial du Chemin des Dames par l'abbé Herlem et l’Union Nationale des Combattants de l'Aisne dont le but était de "favoriser la réconciliation des peuples par le souvenir de leurs fils morts en s'opposant sur ce champ de bataille" qu’un nouveau projet fut soumis. Une souscription publique et des dons en nature (la cloche et le terrain) permirent la construction de l´édifice actuel ainsi que celle de la lanterne des morts, visible depuis les cathédrales de Laon, Soissons et Reims. L´édification de ce complexe mémorial atteste la reconnaissance tardive du rôle historique du Chemin des Dames dans la Première Guerre mondiale. Considérée comme un échec, longtemps passée sous silence, l'offensive Nivelle d’avril 1917 occulta le souvenir, c´est pourquoi le Chemin des Dames ne bénéficia pendant longtemps d'aucune reconnaissance, témoignant ainsi en partie de la lenteur des projets de commémoration. Cerny-en-Laonnois occupe donc aujourd´hui une place majeure dans le circuit de mémoire du Chemin des Dames. Le site symbolise l'ensemble des sacrifices accomplis par les soldats de la Première Guerre mondiale dans l'Aisne. Les troupes coloniales sont ici honorées pour la première fois. En 2013, après avoir été frappée par la foudre, la chapelle a pu être entièrement rénovée.